Lucio Fulci

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Biographie

Biographie
  • Le 31 mars 2014
  • Par Lionel Grenier
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Lucio Fulci naît le 17 juin 1927 à Rome dans une famille sicilienne où il est élevé par sa mère. Le jeune Lucio se passionne pour le football, sport dans lequel il excelle en tant que gardien de but. Sa passion pour la mer le mène au collège naval de Venise puis, au lycée Giulio Cesare de Rome, où il commence à s’intéresser au milieu intellectuel.

Lucio Fulci, jeune

Lucio Fulci à 20 ans (source : Beyond Terror, S. Thrower)

La découverte du milieu intellectuel
Dès l’après-guerre, Lucio Fulci écrit dans la Gazzetta delle Arti pour laquelle il interviewe notamment le grand peintre italien Giorgio de Chirico. Il baigne alors dans un milieu communiste et crée avec des camarades la revue Fabbrica. Son côté « électron-libre » lui cause quelques problèmes avec sa famille et se retrouve donc à dormir chez différents amis peintres ou musiciens. Le jazz devient alors sa grande passion. Pour faire plaisir à sa mère, il suit tout de même des études de médecine mais n’aurait pas passé son diplôme. En revanche, il collabore à Messaggero en tant que critique cinéma, art et musique.
Puis, il se sépare d’une certaine Luisa Federici dont il est terriblement amoureux. Leur différence de classe sociale (elle est très riche) aurait pris le dessus sur leur relation. Cette séparation est un tournant dans la vie de Lucio Fulci. Alors qu’il rentre chez lui en tram, il lit dans le journal l’ouverture des inscriptions au Centro Sperimentale di Cinematografia. Une évidence s’impose : il doit faire du cinéma pour raconter son histoire. Il se présente alors à l’examen d’entrée, face à un jury composé de Luchino Visconti (Président), Umberto Barbaro, Michelangelo Antonioni, Pietro Germi, Lucio Battistrada et Antonio Pietrangeli. Malgré sa critique acerbe d’Ossessione de Visconti qu’il accuse de plagier Jean Renoir, Lucio Fulci est reçu avec mention.

1948-1958 : Les débuts dans le cinéma
Il commence à travailler comme assistant d’Aldo Vergano sur La Terre tremble (1948) de Luchino Visconti. La même année, il co-réalise trois documentaires avec Carletto Romano. Il écrit également un scénario intitulé Jack il Rugginoso pour Mauro Bolognini mais le projet ne sera jamais réalisé. Le producteur Romolo Laurenti vient le chercher pour qu’il devienne l’assistant de Stefano Vanzina, plus connu sous le nom de Steno. Lucio Fulci se lie d’amitié avec le cinéaste qu’il considèrera jusqu’à sa mort comme son « grand maître. » Il apprend le métier en participant à divers scénarii et en étant assistant réalisateur sur de nombreuses productions comme le premier film italien tourné en couleur, Totò a colori. Le producteur Carlo Ponti cherche ensuite à internationaliser Totò. Il achète donc les droits d’une pièce de Pirandello et demande à Fulci de participer à l’écriture du scénario avec Vitaliano Brancati. Le film intitulé L’Uomo la Bestia e la Virtù sort en 1953 avec Totò et Orson Welles dans les rôles principaux.

1958-1966 : Une carrière dans la comédie
En 1958, Lucio Fulci se marie avec Marina. Un an plus tard, il réalise son premier film de fiction, la comédie I Ladri avec Totò, toujours lui. La principale raison de ce passage derrière la caméra serait purement alimentaire. Mais cette première expérience se conclut par un échec commercial. Sa grande connaissance musicale lui permet tout de même de réaliser I Ragazzi del Juke-boxe la même année avec Adriano Celentano qui deviendra le Elvis Presley italien. Les deux hommes se retrouvent en 1960 avec Urlatori alla Sbarra, film pour lequel Lucio Fulci cosigne 24 Mila Baci, chanson reprise par Johnny Hallyday en 1961. Dans Sanremo, la grande sfida, Celentano chante une autre chanson co-écrite par le cinéaste, Il tuo bacio è come un rock. Après Colpo Gobbo all’Italiana (1962) où il se dispute avec le comédien principal, Lucio Fulci s’associe avec Franco Franchi et Ciccio Ingrassia, des Siciliens auxquels il redistribue les rôles : Franco (le petit) sera l’idiot et Ciccio (le grand) le sérieux. Ainsi naît le duo comique le plus célèbre de l’Italie des années 60/70. Ensemble, ils tourneront treize longs métrages dont I Due Evasi di Sing Sing (1964), et OO2 Operazione Luna (1965).

1966-1979 : Un touche à tout de talent
Durant cette période, le cinéaste devient papa à deux reprises. En effet, Maria donne naissance à Antonella le 7 août 1960 puis à Camilla le 6 juillet 1963. Mais sur le plan professionnel, il se sent à l’étroit dans les comédies avec Franco et Ciccio et décide d’aborder son genre préféré : le western. Ainsi, en 1966, il tourne avec succès Le Temps du massacre qui confirme Franco Nero comme nouvelle star du western européen après Django de Sergio Corbucci. Malgré cela, le réalisateur retrouve son duo fétiche (pour des adieux cette fois-ci) avec deux films dont Come Rubammo la Bomba Atomica (1967). Il dirige également pour la première fois Lando Buzzanca avec la comédie policière Au Diable les Anges (1967).

Lucio Fulci sur le plateau de Perversion Story

Lucio Fulci sur le tournage de Perversion Story

1969 sera une année difficile pour Fulci. Nonobstant la réussite tant artistique que commerciale de Perversion Story, son premier thriller, le drame historique Beatrice Cenci connait un échec qui le blesse d’autant plus qu’il s’y est beaucoup investi. Pire, alors qu’elle se croit atteinte d’un cancer, sa femme Maria se suicide…
En dépit de la douleur, le cinéaste continue de travailler.
Durant les dix années qui suivent, il va aborder divers genres. D’abord le giallo avec le très beau Le Venin de la peur où il renvoie dos à dos la bourgeoisie et le mouvement hippie, puis le dérangeant La Longue nuit de l’exorcisme (1972) décrivant un homme d’Eglise assassin d’enfants. Après avoir dû prouver au tribunal que les chiens disséqués du Venin de la Peur n’étaient pas réels, sa comédie Obsédé malgré lui (1972) avec Lando Buzzanca frôle l’interdiction totale. En effet, le président du conseil, Emilio Colombo, apprécie peu cette charge contre la Démocratie Chrétienne à travers laquelle il se reconnaît. Lucio Fulci signe ensuite son meilleur score au box-office italien avec une version sauvage de Croc-Blanc (1973) au point d’en diriger un second volet dans la foulée. Malgré une qualité artistique indéniable, ses productions suivantes n’arrivent pas à confirmer ce succès. Il redirige Tomas Milian dans le western crépusculaire (et ultra violent) Les 4 de l’apocalypse (1975),  fait tourner Lando Buzzanca une dernière fois dans le parodique Dracula in Branzia (1975), s’essaie à la sexy comédie avec On a demandé la main de ma sœur (1976) pour la star du genre, Edwige Fenech, et enfin retourne au giallo en réalisant L’Emmurée vivante (1977) qui marque sa première « collaboration » avec le scénariste Dardano Sacchetti. L’échec de ce dernier long métrage pousse Lucio Fulci à tourner une émission télé avec Franco Franchi (Buonasera con…, 1978).  Il aborde une dernière fois le western alors que celui-ci se meurt en Europe avec l’inédit et sympathique Sella d’Argento (1978).

L’apogée gore
En 1978, Fabrizio De Angelis et Ugo Tucci  veulent profiter du succès de Zombies (1978) de George A. Romero dont le montage européen a été supervisé par Dario Argento.  Ils commandent alors un scénario à Dardano Sacchetti et choisissent Enzo G. Castellari (spécialisé jusque-là dans les westerns) pour la réalisation d’un film de morts-vivants. Mais ce dernier refuse le projet qu’il trouve répugnant et suggère Lucio Fulci pour le remplacer. Le cinéaste romain accepte la proposition, d’autant qu’il a du mal à séduire les producteurs, et retrouve, pour l’occasion, des personnes avec qui il a déjà travaillé et qui constitueront sa squadra historique : Sergio Salvati (photographie), Fabio Frizzi (musique), Franco Bruni (caméra) ou encore Giannetto de Rossi (maquillage). Les producteurs choisissent le titre Zombi 2 (L’Enfer des zombies en France) afin de créer la confusion avec l’œuvre de George A. Romero. Au final, cette fausse suite remporte un immense succès. Ignorant d’abord les recettes mirobolantes de son film, le réalisateur accepte de tourner un très bon polar, La Guerre des gangs (1980), ainsi qu’une série télévisée avec Franco Franchi avant de se spécialiser définitivement dans les films d’horreur qui vont asseoir sa réputation de Maître du macabre. Frayeurs (1980), L’Au-delà (1981) et La Maison près du cimetière (1981) impressionnent par leurs excès gore traversés de fulgurances poétiques. Lucio Fulci se brouille avec Dario Argento qui l’accuse de plagiat et se voit catalogué comme un cinéaste colérique sur les tournages. Peu importe, ces films de morts vivants le font connaître dans le marché anglo-saxon mais surtout en France où il est acclamé au Grand Rex dans le cadre du Festival du Film fantastique de Paris. Puis L’Eventreur de New York (1982) déroute même certains de ses fans par son aspect glauque et la brutalité de ses meurtres de femmes. Ce giallo sera strictement interdit au Royaume-Uni et prouverait la misogynie du cinéaste.
Pour son plus grand regret, il se sépare de son équipe après Manahattan Baby (1982), film qu’il réalise par obligation contractuelle.

Lucio Fulci (à côté du zombie) sur le plateau de L'Au-delà

Lucio Fulci (à côté du zombie) sur le plateau de L’Au-delà

1983-1991 : Déclin (artistique ?) du cinéaste
Suite au succès de Conan, le barbare (1982) de John Milius, les Italiens s’engouffrent dans la brèche de l’heroic fantasy avec un résultat souvent mitigé. Fulci, lui-même, commet un Conquest (1983) de piètre facture. Il aborde ensuite la science-fiction sans plus de réussite : 2072 les mercenaires du futur (1984), dénonçant le fascisme de la télévision, est en effet un sujet trop ambitieux pour son budget. Il s’agit toutefois de la première apparition de sa fille Camilla au poste de script de seconde équipe. Elle deviendra ensuite sa plus proche collaboratrice. Murderock (1984) marque ses retrouvailles avec le giallo mais c’est son manque d’ambition qui fait alors défaut. Le film obtient pourtant le Grand Prix de la Peur au Festival d’Avoriaz deux ans plus tard.
Puis une hépatite C devenue cirrhose éloigne le cinéaste du métier et le laisse pour mort aux yeux des producteurs.
Il revient finalement en 1986 grâce au Miel du Diable, seul projet qui lui est alors proposé. Ce thriller érotique sadomasochiste déroute les fans de sa période « zombies » mais n’en demeure pas moins sa meilleure œuvre depuis L’Eventreur de New York. Il retourne à l’horreur avec Aenigma (1987), tourné en Yougoslavie. Malgré de bons moments, le film souffre d’une photographie assez laide et d’un doublage catastrophique. C’est pourtant avec Aenigma que le cinéaste est célébré au Festival d’Avoriaz en 1988.
Cette même année, il quitte le tournage de Zombi 3 aux Philippines après un conflit avec les producteurs. Il s’agit là du seul film dont il renie la paternité puisqu’il sera terminé par Bruno Mattei et Claudio Fragasso.
Le cinéma italien commence son inexorable agonie mais Lucio Fulci se démène pour continuer à tourner malgré des productions de plus en plus pauvres…
Il signe alors un contrat pour plusieurs longs métrages estampillés « Lucio Fulci presenta » mais, trompé sur les véritables moyens financiers mis à sa disposition, il n’en réalisera que deux : Les Fantômes de Sodome (1988), mauvais, et Soupçons de mort (1988), œuvre beaucoup plus réussie. Il enchaîne sur deux téléfilms dont l’intéressant La Casa nel Tempo (1989) mais ces dernières réalisations attirent peu les distributeurs. Il tente alors de revenir à de l’horreur graphique avec Demonia qui, s’il semble avoir trouvé un public avec les années, n’est qu’un pastiche de ses films phares, sans la magie ni la beauté plastique.
Il trouve un accord avec les producteurs de « Lucio Fulci presenta » qui le libèrent de ses obligations. Pour cela, il doit tourner un film comprenant plusieurs extraits des productions de la série incluant celles réalisées par d’autres. Ainsi naît Nightmare Concert où Lucio Fulci se donne le rôle principal, celui d’un cinéaste spécialisé dans l’horreur emprunt à de terribles cauchemars. Gore, humoristique et sympathique, le film souffre tout de même d’une structure trop éclatée et échoue à être l’œuvre autoréflexive que le sujet pouvait laisser entendre.
Voix profondes (1990) est en revanche une œuvre touchante, très personnelle sur l’acceptation du deuil, que le cinéaste dédie notamment à Clive Barker. Un an plus tard, il tourne son dernier long métrage, Le Porte del Silenzio. L’histoire est celle d’un homme (John Savage avec qui Lucio Fulci se dispute) roulant vers sa propre mort. Epurée à l’extrême (peu d’action, pas de sang et rythme languissant), cet ultime réalisation s’avère audacieuse et, par son thème, conclut idéalement la carrière du cinéaste.

L'Occhio del Testimone, premier livre consacré au cinéaste

L’Occhio del Testimone, premier livre consacré au cinéaste

1991-1996 :  Un réalisateur sans film
A défaut de tourner, Lucio fulci publie en 1992 un recueil de nouvelles intitulé Le Lune Nere dans lequel figurent notamment les textes ayant inspiré ses deux derniers films. La même année, toujours chez Granata Press, Michele Romagnoli lui consacre un livre, L’Occhio del Testimone – il cinema di Lucio Fulci.
Deux ans plus tard, lors du quatorzième Fantafestival, il s’affiche à côté de Dario Argento et Dardano Sacchetti. Les trois hommes se sont réconciliés et prévoient de travailler ensemble sur une nouvelle version de La Momie. Au mois de décembre de la même année, il est acclamé à l’Eurofest à Londres et en 1995, il publie un second recueil, Miei Mostri Adorati. L’ouvrage est composé de nouvelles (dont deux déjà présentes dans Le Lune Nere) mais aussi de souvenirs où il évoque certains moments de sa carrière. Il se lance également dans l’écriture d’un roman, Caccia Agli Angeli Cadut.
Finalement, le projet de La Momie ne convainc pas Dario Argento qui exclut Dardano Sacchetti et se met d’accord avec Lucio Fulci pour travailler sur une nouvelle version du Masque de cire. Malheureusement, le réalisateur décède le 13 mars 1996 alors que la pré-production touche à sa fin. Le film sera réalisé par Sergio Stivaletti et son roman demeurera inachevé…

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